Une décision judiciaire suédoise a relancé le débat sur le contrôle des opérateurs de jeux d’argent vis-à-vis des obligations de lutte contre le blanchiment d’argent. L’opérateur ATG (Aktiebolaget Trav och Galopp) vient d’être condamné à une amende.
De la sanction initiale à l’appel
À l’origine de cette affaire, l’autorité suédoise des jeux, Spelinspektionen, avait infligé en novembre 2022 une amende de 6 millions de couronnes suédoises à ATG pour des manquements jugés graves aux obligations liées au blanchiment d’argent.
L’opérateur a contesté cette sanction devant les juridictions administratives, et le tribunal de première instance avait annulé l’amende, estimant que la sanction appliquée était disproportionnée
Mais l’histoire ne s’arrête pas là : l’affaire est remontée devant la Cour administrative d’appel de Jönköping, qui a rendu son verdict le 14 octobre 2025.
La Cour d’appel a tranché en faveur de l’autorité, validant la gravité des manquements reprochés, mais en réduisant le montant de l’amende à 3 millions SEK. La Cour reconnaît donc l’existence d’un manquement sérieux aux obligations de diligence à l’égard des clients, mais estime que les faits ne justifiaient pas l’amende initiale plus élevée.
Les manquements pointés par la justice
Au cœur du jugement, la Cour d’appel a mis en évidence des carences dans les mécanismes de vérification des clients (due diligence) ainsi que dans l’évaluation des risques de blanchiment et de financement du terrorisme. Autrement dit, ATG n’aurait pas appliqué suffisamment ou correctement les contrôles requis pour s’assurer que ses utilisateurs ne soient pas impliqués dans des flux financiers illicites.
Le jugement souligne que les transactions en question portaient sur des montants significatifs, ce qui accentue l’impact du manquement aux obligations réglementaires de base. La réduction du montant de l’amende par rapport à la somme initiale ne remet pas en question la reconnaissance de faute, mais traduit une nuance quant à l’appréciation de la gravité des faits.
ATG face à des vents contraires
Cette décision survient dans un contexte difficile pour ATG, déjà confronté à une baisse de résultats financiers et à une concurrence accrue du marché non régulé.
Au cours du premier semestre 2025, l’entreprise a vu ses revenus nets de jeux diminuer de 5 % en glissement annuel, pour atteindre 2,566 millions SEK, et le second trimestre affiche une contraction de 2 %. ATG a attribué cette érosion en partie à la hausse de la taxe sur les jeux, passée de 18 % à 22 % à mi-2024 — un changement fiscal ayant entraîné un surcoût estimé à 105 millions SEK pour l’entreprise. Pour autant, la société a insisté sur le fait que son nombre de clients actifs restait stable à environ 1,4 million.
Mais au-delà des chiffres, le jugement fragilise la posture d’ATG comme exemple de conformité et de fiabilité dans l’industrie suédoise des jeux légaux.
Impacts et enseignements
L’amende réduite (3 millions SEK) représente une charge financière certes modeste pour un acteur d’envergure, mais son effet symbolique est loin d’être négligeable. Elle rappelle que la conformité n’est pas une variable d’ajustement, mais une exigence constante.
Pour les opérateurs, le message est clair : renforcer les dispositifs de vérification client, la surveillance des transactions et la gestion des risques est plus que jamais une priorité.
Pour le régulateur, cette décision consolide sa crédibilité et son ambition de réguler un marché en pleine mutation.
Pour le public, c’est l’assurance que même des marques majeures ne sont pas à l’abri de devoir répondre de leurs obligations.