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Côte d’Azur : les as de l’arnaque démasqués

Dans les casinos de la Côte d’Azur, un quatuor originaire du nord de la France a monté, durant l’été 2023, une escroquerie aussi ingénieuse que risquée. Près de 60 000 euros de faux chèques cadeaux ont été écoulés dans les établissements de jeux de Cannes, Nice et Sainte-Maxime. Deux ans plus tard, le tribunal correctionnel de Draguignan a rendu son verdict : la chance a tourné pour les quatre comparses. 

Les casinos de la Riviera pris pour cible

Sous les lumières dorées des casinos Barrière, l’ambiance semblait inchangée : machines à sous clignotantes, jetons qui s’entrechoquent, serveurs en costume. Pourtant, derrière ce décor de luxe, un système de fraude bien rodé s’était installé. 

Apolline, Omar, Maeva et Bruno, tous originaires du nord de la France, avaient trouvé un moyen aussi simple que dangereux pour blanchir de l’argent. Les faux bons cadeaux, d’une valeur faciale de 100 euros, achetés illégalement via la messagerie Telegram, servaient à obtenir des jetons en toute discrétion. Après quelques parties symboliques de machines à sous, les gains pouvaient être encaissés en liquide. 

L’affaire aurait pu passer inaperçue si les protagonistes n’avaient pas répété l’opération avec une régularité troublante. Entre juillet et août 2023, pas moins de 592 chèques cadeaux ont été échangés dans les casinos de Cannes, Cassis, Nice et Sainte-Maxime, pour un préjudice estimé à 59 200 euros. 

Omar et Bruno, considérés comme les têtes pensantes, restaient à distance. Ils envoyaient Apolline et Maeva au front.  

“Des têtes de Françaises, ça passe mieux qu’une tête d’arabe. Si Omar y était allé, ils se seraient doutés de quelque chose,” a reconnu Apolline à la barre.  

Cette stratégie de façade visait à éviter les soupçons du personnel des établissements de jeux. 

Des identités volées et un réseau structuré

L’enquête a rapidement mis au jour un système plus vaste. Les bons provenaient d’un réseau de fausses identités et de cartes bancaires volées, utilisées pour acheter les chèques sur Internet. Bruno en était le pivot. Apolline tenait les comptes avec une précision chirurgicale : nombre de chèques utilisés, kilomètres parcourus, nuits d’hôtel, sommes gagnées et parts reversées. 

Pour la procureure Débora Collombier, il ne s’agissait pas d’une simple improvisation : 

“Il y a dans cette équipe un minimum de structuration, avec Bruno à la gestion du réseau, Omar en bras droit et Apolline et Maeva conscientes de participer à une opération de blanchiment. C’est bien une bande organisée.” 

Omar, de son côté, a tenté de minimiser son rôle : 

“J’ai vu que ça marchait et j’ai profité du système. Je pensais que c’était des chèques d’entreprises, et qu’il n’y avait aucun risque. Mais quand je vois où ça m’a mené… Je regrette. On a fait ça par appât du gain.” 

Une chute inévitable

Lorsque les enquêteurs ont mis la main sur le quatuor, le vernis du luxe s’est craquelé. Bruno, le chef autoproclamé, a d’abord échappé aux premières arrestations. Il a finalement été interpellé en janvier 2025 à Chambéry, dans un autre casino, avec 200 000 euros en petites coupures. 

Déjà condamné à trois ans de prison dans cette affaire parallèle, il a vu sa peine s’alourdir à cinq ans au total, assortie d’une amende de 5 000 euros. Omar, son complice, a écopé de la même sanction. 

Apolline et Maeva, décrites comme les “visages présentables” de l’escroquerie, ont bénéficié de circonstances atténuantes. Elles ont été condamnées à huit mois avec sursis et à une interdiction de fréquenter tout casino pendant cinq ans. 

L’épilogue d’une arnaque trop parfaite

Le tribunal de Draguignan a rendu sa décision avec fermeté, conscient que l’affaire dépasse la simple escroquerie : elle révèle une nouvelle forme de délinquance numérique, à la frontière entre cybercriminalité et fraude de terrain. 

Ces faux chèques cadeaux, vendus à la chaîne sur Telegram, sont devenus l’un des outils privilégiés de réseaux de blanchiment opérant entre la France, la Belgique et le Maghreb. La Côte d’Azur, avec ses casinos emblématiques et son afflux constant de touristes, en a été la victime idéale. 

Glen: Glen apporte un regard neuf sur l'actualité des jeux d'argent, combinant des compétences pointues en matière de recherche et un intérêt profond pour l'évolution du secteur. Il s'efforce toujours d'informer et de stimuler ses lecteurs en couvrant une grande variété de sujets.
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