À Biganos (France), un jeune homme de 26 ans, sans passé de trafiquant notoire, a été condamné pour avoir écoulé plusieurs kilos de drogue… afin de financer une addiction féroce au jeu. Derrière les volets clos d’un logement discret, loin des circuits du crime organisé, se cachait un trafic méthodique, alimenté par la fièvre des casinos. Près d’un demi-million d’euros ont été engloutis dans les machines à sous et les tables de jeu en l’espace d’un an.
Un parking trop fréquenté, un commerce en alerte
Tout commence à Biganos, une commune paisible du bassin d’Arcachon, où un commerçant vigilant remarque une étrange effervescence autour de son magasin. Les voitures défilent, s’arrêtent quelques minutes, puis repartent en vitesse. Ce ballet incessant inquiète: son parking est devenu un point de deal. Face à la situation, il alerte discrètement les gendarmes. Une enquête est lancée.
Les gendarmes de la compagnie d’Arcachon mettent rapidement en place une surveillance discrète. Ils repèrent un jeune homme, souvent vu à trottinette, recevant de nombreuses visites brèves à son domicile. Les allées et venues sont trop fréquentes pour être anodines.
Pour les enquêteurs, plus de doute : il s’agit du revendeur. Une balise GPS est installée sur sa voiture. Elle confirme les soupçons. Les trajets sont courts, réguliers, à des adresses variées. L’hypothèse de livraisons à domicile prend de l’épaisseur.
En mai 2025, une perquisition est ordonnée.
3 kilos de drogue et une messagerie cryptée
Les forces de l’ordre découvrent au domicile du suspect près de 3 kilos de drogue : de la cocaïne, de la résine de cannabis, et de l’herbe. L’homme, âgé de 26 ans, est interpellé. Son téléphone est examiné. Les échanges sur Telegram, messagerie cryptée prisée des trafiquants, révèlent une activité soutenue, avec de nombreux contacts clients.
Ces derniers, interrogés, le reconnaissent comme leur principal fournisseur. Un réseau personnel, efficace, sans violences apparentes, mais à fort rendement.
Un joueur compulsif, pas un baron de la drogue
Lors de son procès au tribunal correctionnel de Bordeaux, l’homme ne nie pas les faits. Mais il livre une version qui en dit long sur les mécaniques de l’addiction.
«Au tout début, j’ai été forcé,» explique-t-il, affirmant avoir été utilisé comme nourrice par d’autres dealers plus expérimentés. «Ensuite, c’est devenu une addiction.»
Mais pas à la drogue. Au jeu.
Interrogés, les responsables du casino local confirment une donnée stupéfiante : en un an, le jeune homme y a dépensé 472 000 euros. Une somme vertigineuse, presque entièrement tirée du trafic. En moyenne, il injectait 26 000 euros par mois dans les machines à sous, les tables de jeu ou les paris.
«Ce n’est pas Al Capone, mais quand même»
Le profil du prévenu étonne. Casier judiciaire déjà chargé : sept mentions, principalement pour conduite sans permis, sans assurance et sous l’emprise de drogues. Mais aucun passé lié à un grand banditisme organisé.
Le procureur, lui, dresse un portrait plus nuancé :
«Ce n’est pas Al Capone, mais tout de même.»
Il souligne la quantité importante de stupéfiants retrouvée chez le prévenu. La présidente du tribunal s’interroge aussi :
«Vous n’êtes pas un petit vendeur : les quantités ne sont pas négligeables.»
L’homme, depuis le box, tente de se justifier :
«C’était pour le long terme.»
Le tribunal tranche : trois ans de prison, dont 18 mois avec sursis, ainsi qu’une amende de 10 000 euros. Une peine que les magistrats estiment proportionnée au volume du trafic, mais aussi à la dimension psychologique du dossier.
L’homme, désormais incarcéré, aura tout perdu : sa liberté, son argent, et peut-être la dernière mise qu’il espérait jouer.
L’addiction, un fléau criminogène ?
Cette affaire relance une question : jusqu’à quel point une addiction peut-elle pousser un individu à franchir la ligne rouge ? Le jeu compulsif, souvent sous-estimé, est pourtant un facteur connu d’endettement, de détresse, et parfois de délinquance.
Les casinos, bien qu’encadrés, attirent parfois ceux qui n’ont plus rien à perdre. Et ceux qui sont prêts à tout pour tenter leur chance, encore une fois.