Le 4 décembre 2025, la régulatrice néerlandaise du jeu en ligne, la Kansspelautoriteit (Ksa), a réuni les principaux opérateurs de paris et casinos en ligne pour une table ronde centré sur la bonne application du devoir de diligence, la responsabilité qu’ils ont vis-à-vis de la protection des joueurs.
Une convocation sous l’égide de trois enquêtes
La Ksa a décidé de convoquer ces opérateurs à la suite de trois enquêtes récentes portant sur l’application concrète du devoir de diligence.
Ces recherches visaient à vérifier si les opérateurs appliquaient sérieusement les obligations de protection des joueurs : suivi des comportements à risque, détection des signes de dépendance, et capacité à intervenir efficacement. Malgré des mécanismes en place, des failles apparaissent selon les opérateurs, tant sur la prévention que sur l’interpellation des joueurs à risque.
Trois défis mis sur la table
Lors du débat, trois sujets majeurs ont concentré l’attention : les signalements à l’exclusion nationale, les entretiens personnalisés avec les joueurs, et la fermeture des comptes — trois volets fondamentaux de la responsabilité des opérateurs.
Le premier point concerne l’obligation d’alerter la régulation en cas de comportements excessifs non corrigés. En pratique, si un opérateur suspecte une addiction ou un usage abusif sans amélioration malgré ses actions, il doit inviter le joueur à s’inscrire dans le registre d’exclusion nationale Cruks. En l’absence d’inscription volontaire, l’opérateur doit envoyer un signalement à la Ksa. Or, l’enquête a révélé que les opérateurs éprouvaient des obstacles à faire ces signalements. Le nombre de signalements variait fortement d’un opérateur à l’autre, certains dossiers fournis étant incomplets. Quelques opérateurs — notamment Unibet (via Optdeck Service Limited) et Holland Casino — ont été salués pour la qualité de leurs dossiers, présentant un processus bien structuré et transparent, ce qui leur a valu de montrer l’exemple lors de la réunion.
Le deuxième point abordé fut l’obligation d’un entretien personnel avec un joueur identifié comme ayant un comportement problématique. Ces entretiens doivent permettre une discussion approfondie, un accompagnement, ou un avertissement sérieux — une étape clé pour éviter que le joueur ne glisse vers une dépendance. Mais selon la Ksa, de nombreux opérateurs rencontrent des difficultés pour réaliser ces entretiens correctement — en temps utile, de manière adaptée et avec suffisamment de suivi. Cela restreint l’efficacité de la prévention.
Enfin, la fermeture de comptes joueurs a été évoquée. Certains opérateurs hésitent lorsque les joueurs demandent eux-mêmes la fermeture, par peur de conséquences financières, ou par manque de protocoles clairs. Lors de l’échange, les entreprises ont partagé leurs pratiques : certaines ferment immédiatement, d’autres assouplissent les conditions, ce qui entraîne des disparités. La Ksa a demandé plus de rigueur et de clarté — à la fois pour protéger les joueurs et pour garantir l’intégrité de la législation qui encadre le jeu en ligne.
Une réunion jugée constructive
Pour la Ksa, représentée par Ella Seijsener, cheffe du département « Zorgplicht Online », ce débat a été productif et porteur d’enseignements. Elle a salué l’ouverture des opérateurs et la qualité de certaines présentations, tout en rappelant que la responsabilité principale ne peut être relativisée.
« C’était bon d’ouvrir le dialogue avec les opérateurs. C’est instructif pour le secteur et cela nous donne aussi des éléments utiles pour notre supervision, » a-t-elle déclaré.
La Ksa annonce qu’elle prendra en compte les retours formulés lors de cette réunion pour orienter ses actions futures. L’année 2026 fera l’objet d’une attention accrue sur ces trois volets — signalements Cruks, entretiens personnels, fermetures de comptes —, dans le cadre du contrôle renforcé de la conformité au devoir de diligence.
Pourquoi ce débat est-il décisif pour le secteur du jeu en ligne ?
Depuis l’ouverture du marché légal des jeux en ligne en 2021, la régulation impose aux opérateurs une série d’obligations — notamment des analyses de risque, des limites de dépôt, et des mesures de prévention — dans le cadre de la loi dite KOA.
Mais les enquêtes menées cette année ont montré que certaines mesures, malgré leur existence juridique, avaient du mal à produire des effets réels. Les analyses de risque manquent parfois de cohérence, les interventions tardent ou sont insuffisantes, et les abus potentiels ne sont pas toujours suivis d’effets pratiques.
En réunissant les opérateurs pour discuter de problèmes concrets et de leurs difficultés, la Ksa tente de franchir un cap : passer d’un simple cadre légal à une mise en œuvre effective. Ce type de dialogue, s’il débouche sur des actions concrètes, pourrait renforcer significativement la protection des joueurs — un impératif dans un secteur sensible.
La table ronde organisée par la Ksa le 4 décembre 2025 marque un tournant important pour le secteur des jeux en ligne aux Pays-Bas. Pour les opérateurs, le message est clair : la protection des joueurs n’est pas qu’une formalité.