X

Loterie Nationale : publicité et bonus sous haute tension

En Belgique, la publicité pour les jeux de hasard est plus qu’un simple sujet de marketing. Ces derniers mois, les règles encadrant la publicité ont poussé les autorités à s’affronter sur une question centrale : la Loterie Nationale doit-elle bénéficier d’un traitement de faveur par rapport aux autres jeux de hasard ?  

La publicité pour les jeux de hasard mise en cause

Depuis plusieurs années, la Belgique a durci les règles régissant la publicité des jeux d’argent, y compris par un arrêté royal entré en vigueur en 2023 visant à limiter drastiquement toute forme de communication incitative autour des jeux de hasard (spots, affiches, médias sociaux, etc.). L’objectif affiché est clair : protéger les citoyens, éviter l’exposition inutile et réduire les risques de dépendance et de jeu excessif. 

Dans ce cadre, la publicité pour les jeux de hasard — à l’exception notable de certaines activités de la Loterie Nationale — a été fortement restreinte. Certaines formes de promotion sont désormais interdites, comme la publicité télévisée ou numérique dès lors qu’elle peut atteindre un public vulnérable, ou encore l’usage de messages personnalisés ou de voix connues pour inciter au jeu. 

Le 11 décembre 2025, la Cour constitutionnelle belge a rendu un arrêt très attendu sur plusieurs mesures introduites par la loi du 18 février 2024 relative aux jeux de hasard, y compris la publicité, l’âge minimum requis (qui devait monter à 21 ans) ou encore l’interdiction des bonus. 

La majorité des nouvelles dispositions ont été jugées conformes, mais la Cour a souligné une discrimination dans l’application de certaines règles à l’encontre des jeux de la Loterie Nationale. Elle a constaté que certains jeux en ligne proposés par la Loterie échappaient à des mesures de protection qui s’appliquent à tous les autres opérateurs de jeux de hasard, ce qui crée une situation inégale contraire au principe d’égalité devant la loi. 

Autrement dit : le législateur a introduit des règles protectrices (âge minimum, publicité, bonus), mais sans les appliquer uniformément à tous les produits numériques de la Loterie Nationale. La Cour considère cela comme discriminatoire et demande au Parlement de corriger cette inégalité d’ici au 31 décembre 2026. 

Le jugement ne supprime pas immédiatement ces mesures, mais il impose une obligation politique et juridique de mettre les règles au même niveau pour tous les acteurs. Cela pourrait signifier, à terme, que la Loterie Nationale devra se conformer aux mêmes restrictions qu’un opérateur privé ou une plateforme de paris en ligne. 

Qu’est-ce qui distingue la Loterie Nationale ?

La Loterie Nationale est une institution particulière. Organisme public contrôlé par l’État belge, elle organise des loteries, des jeux de tirage, des jeux instantanés et des concours depuis des décennies dans un cadre légal strict où les bénéfices sont reversés à des causes publiques et sociales. 

Traditionnellement, les produits de la Loterie sont perçus comme moins agressifs ou moins “addictifs” que d’autres jeux de hasard, ce qui a servi de justification à leur traitement juridique distinct. Le CEO de l’institution a lui-même affirmé que la régulation est nécessaire mais que les jeux de la Loterie présentent des risques moindres en termes de dépendance. 

Cependant, les critiques juridiques et doctrinales pointent un paradoxe : certains jeux de la Loterie ressemblent fortement à des jeux en ligne gérés par des opérateurs privés, ce qui pose question en termes de cohérence réglementaire et de concurrence loyale. 

Quels enjeux pour les joueurs et la société ?

Les débats autour de la publicité pour les jeux de hasard ne se réduisent pas à des enjeux commerciaux ou marketing. Ils touchent à des questions sociales profondes : la protection des personnes vulnérables, la prévention de l’addiction, et la responsabilité des acteurs publics et privés dans la diffusion de messages susceptibles d’influencer les comportements. 

Si certains experts estiment qu’une interdiction totale est le moyen le plus efficace de protéger la population des risques liés aux jeux de hasard, d’autres soulignent que l’information des joueurs vers des offres légales et sûres est essentielle pour lutter contre les sites illégaux. D’autres pays européens, comme l’Italie ou l’Espagne, ont déjà expérimenté des interdictions très strictes. 

Dans le cas belge, la situation légale singulière de la Loterie Nationale et son rôle public font de ce débat une question délicate, où s’entremêlent protection des citoyens, principes de concurrence et libertés économiques. 

Ce qui pourrait changer d’ici 2026

La balle est désormais dans le camp du législateur belge. Les décisions à prendre avant fin 2026 devront concilier les exigences de la Cour constitutionnelle, la sécurité juridique et les objectifs de santé publique. 

Pour les joueurs, cela pourrait signifier une publicité moins omniprésente et plus responsable, quel que soit l’opérateur concerné. Pour la Loterie Nationale, cela pourrait marquer la fin d’un régime juridique particulier dont l’existence est désormais contestée sur la base des principes constitutionnels d’égalité et non-discrimination. 

Les prochains mois s’annoncent décisifs pour l’avenir des jeux de hasard et de leur publicité en Belgique — un débat qui, loin d’être clos, touche au cœur des libertés individuelles aussi bien qu’à la protection collective. 

Alex: Alex explore le monde des casinos à travers des articles informatifs et divertissants. Nourri par une passion profonde pour l'art et la télévision, chaque texte témoigne d'une attention particulière aux détails et d'une quête d’équilibre entre rigueur et créativité. Que ce soit pour démystifier des stratégies de jeu ou raconter l’histoire fascinante des casinos, son objectif est d'informer tout en captivant ses lecteurs.
Related Post