Noah Vineberg, résident d’Ottawa de 52 ans, célèbre aujourd’hui plus de sept ans d’abstinence après avoir englouti près d’un million de dollars dans les jeux d’argent, dont la majorité en paris sportifs. Récit d’une reconstruction psychologique fragile d’un homme qui consacre désormais sa vie à guider les autres vers la sortie de la dépendance.
Pour comprendre la résilience actuelle de Noah Vineberg, il faut mesurer la profondeur du gouffre dont il s’est extrait. Il s’est confié à Casino Beats lors d’une interview émouvante.
Tout a commencé par un pari anodin à l’âge de 10 ans, une étincelle qui s’est transformée en brasier au lycée via la plateforme gouvernementale Pro-Line. Ce système, permettant de créer des paris combinés de 3 à 10 sélections, a été pour lui la porte d’entrée vers une addiction dévorante.
1 million de dollars perdu
Au total, Vineberg estime avoir perdu 1 million de dollars. Si le poker, le blackjack et les tickets à gratter ont contribué à cette hémorragie, ce sont bien les paris sportifs qui ont le plus contribué à cette perte, avec 600 000 $ engloutis dans les paris.
L’addiction ne connaît pas de logique rationnelle. Vineberg pariait sur le hockey, les courses hippiques, le football et même le cricket, un sport dont il ignorait pourtant les règles.
«J’ai vécu de première main comment les paris sportifs peuvent ruiner une vie. J’ai menti à ma famille, compromis des mariages, manqué des paiements hypothécaires, envisagé le suicide… J’ai perdu bien plus que de l’argent.»
Aujourd’hui président de la section locale 279 de l’ATU (Amalgamated Transit Union) et père de quatre enfants, Vineberg pose un regard lucide sur ces années sombres. Il a transformé sa douleur passée en un outil pédagogique.
Une guérison fragile
Interrogé sur la nature de son rétablissement, Noah Vineberg rejette l’idée d’une victoire définitive. Pour lui, la sobriété est une ligne fine qu’il faut arpenter avec humilité. L’addiction au jeu n’est souvent que le symptôme d’un mal-être plus profond, une méthode pour fuir la réalité et les douleurs émotionnelles.
La vigilance doit être constante. Comme il le souligne, chaque événement marquant de la vie, qu’il soit positif ou négatif, porte en lui le risque d’une rechute.
«C’est fragile. La rechute pourrait m’attendre au tournant. Comme tout ce qui vaut la peine dans la vie, cela demande du travail, de la diligence et des efforts.»
De patient à mentor
La rédemption de Vineberg passe par l’action. Il est devenu un intervenant régulier au Hotel Dieu Grace Gambling and Digital Dependence Program, l’institution même qui l’a aidé à s’en sortir.
Ce changement de statut a été un moment charnière pour lui. Lors du 25e anniversaire du programme, alors qu’il était invité à parler, le directeur l’a présenté non pas comme un ancien patient, mais comme un nouveau membre de l’équipe. Cette reconnaissance a transformé sa perception de lui-même. Il n’était plus une victime, mais un acteur du changement doté de responsabilités.
La force du groupe et de l’empathie
Lors de ses interventions, Vineberg ne cherche pas à faire la morale. Il raconte son histoire, parfois brute, parfois émotionnelle, mais toujours réelle.
Son carburant ? L’étincelle d’espoir qu’il perçoit dans les yeux des participants lorsqu’ils réalisent que leur vie ne doit pas nécessairement s’arrêter là où celle de Vineberg a failli finir.
Il partage ce cheminement avec un « frère d’armes », une personne rencontrée avant même d’entrer dans le programme et avec qui il a traversé toutes les étapes de la thérapie. Cette personne, qu’il considère aujourd’hui comme sa famille, dirige désormais une réunion des Joueurs Anonymes.
Aux joueurs qui luttent encore aujourd’hui, Noah Vineberg offre un conseil qui dépasse la simple abstinence. Si le chemin facile mène toujours à la déception, le chemin difficile de la guérison est le plus beau cadeau que l’on puisse s’offrir.
« Mon message à tous ceux qui luttent est le suivant : l’empathie est essentielle. La guérison est le plus beau cadeau que vous puissiez vous faire. Chérissez-la. Respectez-la. Ne la tenez pas pour acquise.»