En Belgique, la hausse de l’âge légal pour les jeux d’argent à 21 ans, entrée en vigueur en septembre 2024, visait à protéger les plus jeunes. Mais une enquête révèle déjà un effet inattendu : de nombreux 18-20 ans contournent la loi en se tournant vers des sites illégaux, échappant à tout contrôle.
Un virage légal qui pousse vers l’illégalité
Depuis le 1er septembre 2024, la Belgique a modifié sa réglementation des jeux en ligne en élevant l’âge légal minimum pour tous les jeux d’argent à 21 ans, là où précédemment les paris sportifs étaient autorisés dès 18 ans. Cette décision visait à freiner l’accès des jeunes adultes à des offres jugées risquées, notamment les paris combinés et les paris en direct, considérés comme plus susceptibles de générer des comportements impulsifs ou problématiques.
Cependant, une enquête conduite par DataSynergy, mandatée par la Commission des jeux de hasard, révèle un phénomène inattendu et inquiétant : une proportion non négligeable de jeunes âgés de 18 à 20 ans continue de parier, en recourant pour beaucoup à des plateformes illégales.
Chiffres révélateurs : l’étendue du phénomène
Avant le changement de loi, environ 30 000 jeunes de 18 à 20 ans s’inscrivaient chaque année sur des casinos en ligne légaux. Après le relèvement de l’âge légal, l’étude indique que 40 % de ceux qui étaient concernés continuent de jouer, mais sur des sites non agréés.
BAGO affirme que 65 % des jeunes hommes de cette tranche d’âge jouent maintenant chez des opérateurs non autorisés.
Magali Clavie, présidente de la CJH :
“Nos chiffres montrent que plus de 20 % des joueurs âgés de 18 à 20 ans participent à des jeux d’argent illégaux.”
Publicité, contournements et défis de l’application
Parallèlement au relèvement de l’âge légal, la Belgique a instauré presque un interdit total de publicité pour les jeux d’argent depuis 2023, avec des mesures supplémentaires concernant le sponsoring sportif à partir de 2025.
Mais les opérateurs illégaux, selon la CJH, trouvent des moyens pour contourner ces interdits. Certains utilisent de nouvelles marques ou logos, d’autres diffusent du contenu via les réseaux sociaux ou envoi de messages (emails, SMS) pour recruter. Les noms et images de plateformes légales sont parfois usurpés. Le contrôle s’avère ardu, notamment pour distinguer ce qui relève de l’information légitime ou de la publicité déguisée.
Vers une réforme structurelle et une coopération internationale
Face à l’ampleur croissante du phénomène, la CJH prépare une réforme de fond : à partir de janvier 2026, elle sera rattachée au ministère de l’Économie, ce qui devrait lui fournir plus de moyens et davantage d’indépendance.
Par ailleurs, la collaboration internationale est jugée essentielle. Magali Clavie est devenue cette année vice-présidente du GREF (le réseau européen des régulateurs des jeux de hasard à distance) et la commission belge a signé un accord avec le régulateur irlandais (GRAI) pour coordonner les actions contre les opérateurs illégaux.
L’expérience belge montre que durcir les règles légales sans assurer l’application et sans offrir des alternatives ou une éducation suffisante peut pousser une partie des jeunes adultes vers des jeux illégaux. Si l’intention reste protectrice, la mise en œuvre doit être holistique : âge légal, publicité, moyens humains, surveillance et coopération internationale doivent agir de pair.