Evolution AB, leader mondial des jeux de casino en direct et fournisseur coté à Stockholm, reste l’une des entreprises les plus rentables de son secteur. Mais la rentabilité ne suffit plus à rassurer les marchés.
Un géant de l’iGaming fragilisé par ses choix de marché
En un mois, son action a perdu près de 10 %, passant de plus de 880 SEK début août 2025 à moins de 800 SEK début septembre. Ce recul équivaut à une perte d’environ 13 milliards de SEK en capitalisation boursière.
Les rachats d’actions massifs, censés soutenir le cours, n’ont pas inversé la tendance. Pourquoi ? Parce que la question centrale dépasse la simple volatilité : Evolution est accusée de tirer une part importante de ses revenus de marchés non régulés, parfois même illégaux.
Quand la justice américaine ferme la porte, les doutes persistent
Début septembre 2025, un tribunal fédéral américain a rejeté une action collective intentée par des investisseurs en ADR. Ils accusaient Evolution d’avoir minimisé son exposition aux sanctions potentielles dans des juridictions interdisant ou limitant sévèrement les jeux d’argent en ligne.
Le rejet s’est fait pour des raisons de compétence juridictionnelle, non sur le fond. En clair : les plaignants n’ont pas obtenu gain de cause, mais les soupçons demeurent.
Ces inquiétudes ne datent pas d’hier. Dès 2021, des enquêtes médiatiques révélaient déjà la présence de produits Evolution sur des sites opérant sans licence. L’entreprise avait promis un audit interne. Quatre ans plus tard, les critiques ressurgissent, amplifiées par l’attention croissante des régulateurs.
Les régulateurs resserrent l’étau
La Commission britannique des jeux (UKGC), l’une des autorités les plus influentes d’Europe, a examiné de près les relations commerciales d’Evolution. La Spelinspektionen en Suède et les autorités australiennes ont, elles aussi, ciblé des opérateurs clients soupçonnés de contourner la loi.
Le problème est systémique : si un fournisseur alimente des sites actifs sur des marchés interdits, il devient partie prenante d’une chaîne jugée illégale. L’argument récurrent d’Evolution – ils ne contrôleraient pas où leurs jeux apparaissent une fois licenciés à des opérateurs – convainc de moins en moins.
Sur le papier, Evolution reste extrêmement rentable. Mais cette rentabilité repose en partie sur des marchés gris ou noirs. Tant que les autorités ferment les yeux, les revenus affluent. Mais une intervention réglementaire peut les réduire à néant du jour au lendemain.
Les investisseurs en sont conscients. En janvier 2025, l’action avait déjà chuté de 12 % après des révélations médiatiques. En avril, des résultats trimestriels décevants avaient provoqué une nouvelle baisse de 16 %. Le mois d’août a ajouté un recul supplémentaire de près de 10 %.
La répétition de ces épisodes installe un schéma inquiétant : chaque fois que la question des marchés non régulés revient sur la table, la valeur d’Evolution s’effondre.
Pourquoi Evolution attire plus d’attention que ses rivaux
D’autres fournisseurs, tels que Pragmatic Play ou Hacksaw, apparaissent également sur des sites non régulés. Mais Evolution concentre les projecteurs pour deux raisons : sa taille et sa position dominante.
Être le leader du secteur signifie être plus surveillé. Les régulateurs veulent des exemples, les médias privilégient les grandes entreprises et les investisseurs scrutent en priorité le numéro un.
Le dilemme stratégique : croissance rapide ou durabilité ?
L’histoire de l’industrie du jeu offre des précédents. Les acteurs trop dépendants de marchés interdits ont vu leur valorisation s’effondrer lorsque la régulation s’est durcie. Ceux qui ont basculé vers des marchés régulés ont survécu, au prix d’une croissance plus lente.
Evolution se trouve aujourd’hui à cette croisée des chemins. Doit-elle continuer à privilégier des revenus rapides mais risqués, ou accepter une croissance plus modérée en s’ancrant dans des juridictions autorisées ?
Les investisseurs envoient un message clair : le modèle actuel inspire de moins en moins confiance.