Le Sénat frappe fort avec une augmentation des taxes sur le jeu
La fiscalité des jeux de hasard et d’argent en France s’apprête à subir un profond bouleversement. Dans le cadre du Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale (PLFSS) pour 2025, le Sénat a approuvé une série de mesures visant à augmenter significativement les taxes sur les jeux, qu’ils soient physiques ou en ligne. Ces décisions suscitent à la fois l’espoir d’une meilleure régulation et des inquiétudes quant aux répercussions économiques.
Hausse ciblée mais conséquente
Parmi les principales mesures adoptées, les taux de taxation des casinos terrestres, des paris sportifs et du poker en ligne sont particulièrement concernés. Par exemple :
- Les machines à sous verront leur taxe passer de 7,6 % à 8,1 %.
- Les paris sportifs en ligne subiront une hausse de 10,6 % à 11,6 %.
- Le poker en ligne est l’un des plus touchés, avec un passage à 10 % de prélèvement sur le Produit Brut des Jeux (PBJ), contre seulement 0,2 % auparavant.
Ces hausses devraient permettre de générer 1,6 milliard d’euros de recettes fiscales en 2025, contre 1,2 milliard en 2023, selon des projections.
Enjeu sanitaire et social
Au-delà des chiffres, cette réforme fiscale vise à répondre à des préoccupations de santé publique.
«L’essor des jeux de hasard s’accompagne d’une augmentation du nombre de personnes souffrant d’addiction, avec des conséquences graves : surendettement, isolement et troubles psychologiques.»
Élisabeth Doineau, Sénatrice
Les revenus issus de ces nouvelles taxes seront en partie fléchés vers la branche maladie, notamment pour financer des programmes de prévention contre l’addiction aux jeux.
À quoi servira cette augmentation ?
L’augmentation des taxes sur les jeux d’argent vise plusieurs objectifs concrets. En premier lieu, ces recettes supplémentaires permettront de renforcer le financement de la branche maladie de la Sécurité sociale. Une part significative des 1,6 milliard d’euros attendus sera consacrée à des programmes de prévention et de traitement des addictions liées aux jeux d’argent, afin de mieux accompagner les personnes vulnérables.
Par ailleurs, cette fiscalité renforcée contribuera à financer des actions de sensibilisation et à mettre en place des dispositifs pour décourager les pratiques excessives, notamment auprès des jeunes et des populations défavorisées.
Enfin, le gouvernement espère également utiliser une partie de ces fonds pour soutenir des initiatives de régulation visant à assainir un secteur en pleine croissance, tout en maintenant un cadre économique compétitif et équitable.
Une industrie inquiète
Du côté des opérateurs de jeux d’argent, la pilule passe mal.
«Cette hausse fiscale pourrait réduire la compétitivité du secteur et inciter les joueurs à se tourner vers des plateformes illégales.»
La fiscalité globale, qui pourrait avoisiner 60 % du PBJ, est perçue comme un frein au dynamisme du marché, qui a pourtant atteint un record de 13,4 milliards d’euros en 2023.
De plus, certains segments, comme les paris hippiques, bénéficient d’exemptions fiscales pour préserver leurs filières, ce qui suscite des critiques sur un traitement inégal.
Les paris sportifs au cœur des débats
Les paris sportifs, en ligne ou physiques, ont été un sujet particulièrement sensible. Un amendement a limité la hausse fiscale à 1 %, contre 4,4 % initialement envisagés, afin de protéger les partenariats entre opérateurs et organisations sportives, encore fragilisées par la crise sanitaire.
Mais cette décision ne fait pas l’unanimité. Le sénateur écologiste Thomas Dossus dénonce ces plateformes comme des parasites, accusant leur marketing agressif de cibler les populations vulnérables.
«Ces plateformes favorisent l’addiction et contribuent à la toxicité dans le milieu sportif, notamment par le cyberharcèlement des joueurs.»
Thomas Dossus
Un projet encore en suspens
Bien que le Sénat ait adopté ces mesures, rien n’est encore définitif. Le projet de loi doit désormais être examiné par l’Assemblée nationale, où des amendements pourraient encore modifier ou ajuster les dispositions votées. Ce passage crucial pourrait être l’occasion pour les députés de prendre en compte les préoccupations des différents acteurs, qu’il s’agisse des opérateurs de jeux, des associations de lutte contre l’addiction ou des élus locaux défendant les secteurs exemptés, comme les paris hippiques.
Cette étape finale sera déterminante pour confirmer, ajuster ou rejeter ces hausses fiscales. Ainsi, les jeux ne sont pas encore faits, et les débats à venir s’annoncent tout aussi intenses que ceux déjà observés au Sénat.