Lamotte-Beuvron mise sur le casino
Lamotte-Beuvron, paisible commune solognote du Loir-et-Cher, pourrait bien devenir la future terre du jeu en Centre-Val de Loire. À la croisée des chevaux et des forêts, cette petite ville de 4 700 habitants espère, grâce à une modification de la loi, réparer ce que son maire appelle une “injustice territoriale”.
Un pari sur l’avenir pour la Sologne
Aux portes du Loiret, à quarante minutes d’Orléans, Lamotte-Beuvron rêve de voir naître un établissement de jeux flambant neuf. Aujourd’hui, les joueurs orléanais les plus téméraires doivent rouler plus de 150 kilomètres jusqu’à Pougues-les-Eaux dans la Nièvre, ou encore Enghien-les-Bains, au nord de Paris, pour faire tourner la roulette. De quoi frustrer toute une région, laissée en marge d’un secteur à la fois touristique et économique.
Un casino à Lamotte-Beuvron, ce serait aussi l’assurance d’un souffle nouveau pour la Sologne, cette terre de forêts, de chasse et d’équitation, qui attire déjà des milliers de visiteurs chaque année.
La loi de 2023 change la donne
Jusqu’à récemment, seuls les sites balnéaires et thermaux pouvaient accueillir un casino en France, selon un décret remontant… à Napoléon Ier. Mais le 14 décembre 2023, la loi “visant à réduire les inégalités territoriales pour les ouvertures de casinos” est venue bouleverser la donne.
Le texte, en son alinéa n°6, ouvre la possibilité d’implantation à d’autres territoires, à condition qu’ils disposent d’un lien fort avec le monde équestre :
- siège d’une société de courses hippiques,
- site du Cadre noir de Saumur,
- ou haras national ayant organisé au moins dix événements équestres d’envergure nationale ou internationale par an entre 2018 et 2023.
“La boîte de Pandore des casinos a été rouverte”, se souvient le maire.
Et Lamotte-Beuvron a immédiatement vu dans cette réforme une occasion unique.
Lamotte-Beuvron, capitale équestre ignorée
Le paradoxe est saisissant : comment la commune qui abrite le siège de la Fédération française d’équitation (FFE) et le deuxième site équestre mondial peut-elle être exclue du dispositif ?
Depuis 1994, Lamotte-Beuvron accueille le Generali Open de France, plus grande manifestation équestre au monde, inscrite au Guinness World Records. Chaque été, des dizaines de milliers de cavaliers y convergent. À cela s’ajoute le Game Fair, salon international de la chasse et de la nature, qui attire également une clientèle à fort pouvoir d’achat.
Pour le maire, tous les critères sont remplis. Pourtant, la commune ne figure pas parmi les éligibles. Une exclusion qu’il qualifie de non-sens administratif, voire d’oubli du législateur.
Face à ce qu’il considère comme une injustice, Pascal Bioulac a saisi en 2024 le ministre de l’Intérieur de l’époque, Gérald Darmanin. Dans un courrier resté sans réponse, il plaidait pour une révision du texte. Mais le remaniement ministériel a, semble-t-il, ralenti les démarches.
Un levier économique pour tout le Centre-Val de Loire
Au-delà du symbole, l’enjeu est clair : le développement économique. Pour Pascal Bioulac, un casino à Lamotte-Beuvron représenterait trente ans de développement condensés en un projet.
En tant que président de Cœur de Sologne, la communauté de communes la plus touristique du Centre-Val de Loire, il sait ce que signifie une telle implantation. Le territoire enregistre déjà le plus grand nombre de nuitées de la région, et perçoit la plus importante taxe de séjour.
Orléans, Tours, Bourges, mais aussi le sud de l’Île-de-France pourraient être concernés. De quoi créer un véritable pôle d’attractivité au cœur de la Sologne.
Si la commune affiche sa détermination, le chemin reste long. L’obtention d’une licence de casino en France nécessite une autorisation conjointe du ministère de l’Intérieur et du ministère des Finances, sur la base d’un dossier solide.
Reste à savoir si la réforme de 2023 sera amendée pour inclure Lamotte-Beuvron. En attendant, la petite cité équestre continue d’espérer, portée par ses ambitions et le soutien d’une population fière de son identité.

