EGBA impose un pacte pour les influenceurs des jeux d’argent
Dans un contexte où les influenceurs façonnent les choix des internautes, l’industrie du jeu en ligne fait face à une nouvelle exigence. Le 21 octobre 2025, l’European Gaming and Betting Association (EGBA) a pris l’initiative de lancer un Pledge on Responsible Influencer Marketing in Online Gambling, un engagement inédit visant à encadrer strictement le recours aux influenceurs dans la promotion des jeux d’argent.
Une initiative pionnière au cœur du secteur du jeu
Depuis longtemps, les opérateurs de jeux en ligne sont soumis à des codes publicitaires, comme le Code of Conduct sur la publicité responsable développé par l’EGBA. Mais jusqu’à présent, peu de textes spécifiques concernaient le domaine des influenceurs, pourtant devenu central dans les stratégies marketing digitales.
L’EGBA, en collaboration avec l’European Advertising Standards Alliance (EASA), a donc décidé de combler ce vide. Leur nouveau pacte se veut le premier cadre à l’échelle européenne destiné aux contenus d’influence dans le secteur du jeu.
Selon le communiqué officiel, ce pacte ne se limite pas à des déclarations : il impose des standards concrets autour de trois axes majeurs, dont l’objectif est clair : réconcilier publicité, influence et protection des consommateurs.
Trois piliers pour garantir l’intégrité
1. Des standards publicitaires renforcés
Le premier pilier du pacte vise à garantir que les contenus liés au jeu en ligne soient transparents, responsables, et impossibles d’accès aux mineurs. Pour cela, les principes clés sont :
- la vérification d’âge pour empêcher les mineurs d’accéder aux contenus promouvant le jeu,
- la modération du contenu et des contrôles démographiques d’audience afin d’éviter que les publications séduisantes pour les jeunes soient diffusées à un public vulnérable,
- une exigence de transparence claire — l’influenceur doit signaler quand une publication est sponsorisée ou publicitaire.
L’idée est de bâtir sur l’interdiction déjà en place dans le Code EGBA qui proscrit toute publicité à allure enfantine ou visant les mineurs, mais aussi d’aller plus loin en contrôlant les audiences ciblées.
2. Des critères stricts pour sélectionner les influenceurs
Le deuxième pilier impose aux opérateurs membres de l’EGBA de ne travailler qu’avec des influenceurs triés sur le volet, ayant démontré un comportement marketing responsable. Il ne s’agit plus seulement de choix commerciaux mais de choix éthiques.
Les critères exigés incluent :
- la conformité aux législations publicitaires européennes et nationales,
- l’acceptation de formations continues pour rester à jour des évolutions du cadre légal et auto-réglementaire,
- un historique sans manquement majeur constaté en matière de communication liée au jeu.
Ainsi, l’EGBA espère créer un réseau d’influenceurs sensibilisés et responsables, réduisant les risques de dérives.
3. Une surveillance externe et un retrait rapide
Enfin, pour garantir l’efficacité du dispositif, le pacte prévoit un monitoring indépendant des contenus d’influenceurs. Les membres s’engagent à ce que des entités tierces vérifient régulièrement les publications, à signaler et qu’à retirer promptement toute communication non conforme.
Ce mécanisme vise à éviter les zones grises : aucun contenu ne doit passer entre les mailles du filet. Le retrait rapide est un élément essentiel du processus de responsabilisation.
Les formats concernés sont tous ceux produits par des influenceurs – posts, stories, vidéos, lives, ou tout autre format digital – sans exception.
Quelle portée et quelles limites pour ce serment ?
Ce pacte s’applique exclusivement aux membres de l’EGBA, des opérateurs de jeu en ligne licenciés au sein de l’Union européenne. Pour eux, c’est une obligation morale, mais pas encore juridique. Les influenceurs n’ayant pas de statut d’adhérent ne sont pas contraints directement par ce serment, sauf contractuellement par les opérateurs.
Comme le souligne Maarten Haijer, Secrétaire général de l’EGBA :
“Alors que le paysage de la publicité en ligne continue d’évoluer, nous sommes fiers d’être à la pointe du secteur avec les premières normes complètes en matière de marketing d’influence dans le secteur européen des jeux d’argent. Cet engagement témoigne de la volonté de nos membres de pratiquer une publicité responsable et d’aller au-delà des exigences réglementaires afin de garantir les normes les plus élevées en matière de transparence et de protection des mineurs dans le cadre de leurs partenariats avec des influenceurs.”
À court terme, ce pacte pourrait renforcer la crédibilité de l’industrie du jeu face aux critiques sur l’influence des réseaux sociaux, particulièrement auprès des jeunes publics. Les opérateurs adoptant ces standards pourraient s’en servir comme argument dans leurs politiques de conformité et de communication publique.
Au-delà, l’initiative s’inscrit dans une tendance plus large : identifier et prévenir les comportements à risque avant qu’ils ne deviennent pathologiques. Dans cette logique, l’EGBA a récemment participé à l’adoption d’un standard européen sur les marqueurs de préjudice dans le jeu, afin de détecter précocement les signaux d’addiction.
Un tournant sous conditions
L’initiative de l’EGBA marque une étape importante dans la régulation du marketing numérique lié aux jeux d’argent. En posant un code de conduite pour les influenceurs, l’association affiche une ambition claire : responsabiliser un secteur exposé à des dérives.
Pour autant, l’efficacité de ce pacte dépendra de son contrôle rigoureux, de la volonté d’adhésion des opérateurs, de la qualité des mécanismes de vérification et, in fine, de la confiance des consommateurs. Ce serment pourrait devenir un modèle pour d’autres secteurs confrontés aux enjeux éthiques de l’influence digitale — à condition qu’il s’impose non par la contrainte mais par la crédibilité.

