Nouvelle loi anti-blanchiment de l’UE : Didier Reynders pourrait-il éviter l’enquête ?
L’ancien commissaire européen Didier Reynders est au cœur d’une enquête judiciaire délicate en Belgique. Il est soupçonné d’avoir utilisé la Loterie Nationale pour blanchir des fonds, une accusation qui soulève des questions sur les failles des systèmes de contrôle en Europe. Ironiquement, une nouvelle législation européenne anti-blanchiment (AML), attendue pour 2027, pourrait paradoxalement protéger des acteurs comme Reynders en exemptant les loteries nationales de certains contrôles rigoureux.
Une loi controversée
La nouvelle législation anti-blanchiment (AML) de l’Union européenne, prévue pour entrer en vigueur en 2027, est une réforme ambitieuse visant à renforcer les mécanismes de lutte contre les flux financiers illicites. Elle s’inscrit dans un contexte où les scandales de blanchiment d’argent, souvent impliquant des sommes colossales, ont terni la réputation de plusieurs États membres. Cependant, une disposition particulière, introduite tardivement, suscite des inquiétudes : l’exemption des loteries nationales.
L’objectif principal de la législation est de moderniser et d’harmoniser les règles anti-blanchiment au sein des 27 États membres. Le texte final de cette réglementation inclut une clause controversée qui classe les loteries nationales comme des entités à faible risque de blanchiment d’argent.
Les conséquences potentielles
En classant les loteries nationales comme des entités à faible risque, les États membres pourront demander une dérogation à certaines obligations AML, sous réserve de l’approbation de la Commission européenne. Ces dérogations pourraient inclure :
- Une réduction des obligations de déclaration pour les transactions suspectes.
- Une limitation des audits externes imposés aux loteries.
- Une moindre surveillance des flux financiers liés aux activités de ces entités.
Ce n’est pas la Commission européenne qui a proposé cette exemption dans son projet initial de 2021. Elle a été ajoutée à la suite de pressions exercées par certains députés européens, notamment en provenance d’États membres ayant des intérêts économiques dans leurs loteries nationales. Les négociations autour de cette clause ont été tendues jusqu’à la fin de 2023, reflétant des divergences importantes entre les parties prenantes.
Un timing troublant
La coïncidence entre l’introduction de la nouvelle loi et l’affaire Reynders interpelle. Didier Reynders nie toute influence sur la réglementation ou sur la Loterie durant son mandat, mais les critiques rappellent qu’il était aux commandes de la Justice européenne au moment où les discussions sur la loi étaient en cours. Cette exemption pourrait-elle être exploitée pour minimiser les risques juridiques auxquels il fait face ? C’est l’avis de certains qui se demandent si cette législation pourrait indirectement protéger des pratiques actuellement sous investigation.
Bien que la nouvelle loi AML ait été saluée pour son ambition, son efficacité pourrait être mise en péril par cette controverse. Les critiques appellent à une révision de ces exemptions avant l’entrée en vigueur de la législation, afin d’assurer que toutes les entités, y compris les loteries nationales, soient soumises à des contrôles rigoureux et équitables.