Selon une nouvelle étude commandée par VNLOK, l’association néerlandaise des opérateurs de jeu en ligne autorisés, la quasi-totalité des annonces vues sur Facebook et Instagram ne respectent pas la loi. En octobre 2025, 95,5 % des publicités de jeux d’argent visibles par des utilisateurs aux Pays-Bas ciblaient des casinos sans licence — un signal d’alarme pour la régulation du jeu en ligne.
Plongée dans l’enquête : comment 61 700 pubs illégales ont été identifiées
L’enquête a analysé la bibliothèque publicitaire de Meta (le groupe derrière Facebook et Instagram), à l’aide de dix mots-clés représentatifs. Grâce à cela, les chercheurs ont repéré 64 622 annonces actives en octobre 2025, destinées à des internautes aux Pays-Bas. Parmi elles, 61 717 — soit 95,5 % — faisaient la promotion de sites de casino en ligne sans aucune licence valide aux Pays-Bas. À côté, à peine 1 888 annonces provenaient de casinos légaux. Le constat est sans appel : l’immense majorité des pubs de jeux d’argent sur les réseaux sociaux sont illégales.
Le rapport compte 588 pages Facebook distinctes diffusant ces publicités. Parmi elles, 567 promoteurs se rendaient coupables de publicité pour des casinos non autorisés. Quand on creuse un peu, on découvre une stratégie délibérée : pour éviter d’être repérées par les filtres de Meta, la plupart des annonces sont éphémères. Sur les quelque 58 000 pubs illégales toujours actives après la suppression d’un petit nombre, 48 856 n’ont été actives qu’une seule journée. Un vrai jeu du chat et de la souris.
Redirections pour contourner les contrôles
L’enquête n’a pas seulement regardé le volume des pubs, mais aussi leur nature. Elle révèle que 85 % des annonces illégales utilisaient une image ou une vidéo — soit un visuel conçu pour attirer l’œil. Dans 13 % des cas, il s’agissait même d’annonces dynamiques dont l’image et le texte sont adaptés à l’utilisateur ciblé.
Mais surtout : dans la majorité des cas, les pubs n’envoyaient pas directement vers un site de casino illégal. Pour contourner la modération automatique, elles invitaient l’utilisateur à “jouer un jeu” ou à “télécharger une application”. Ce n’est qu’ensuite que l’app menait à un casino non autorisé. Ainsi, 85 % des redirections s’appuyaient sur ce stratagème.
Ce mécanisme rend la tâche des modérateurs plus difficile — et pose un grave risque d’exposition, notamment pour des publics vulnérables.
Pourquoi une telle explosion de la publicité illégale ?
Le constat de VNLOK reflète un déséquilibre majeur : alors que le cadre légal impose des restrictions strictes pour les jeux d’argent, le marché illégal prospère via les canaux numériques. Cette situation est d’autant plus préoccupante qu’un autre rapport récent indique que, si le nombre de joueurs actifs sur des casinos sans licence diminue, ceux qui restent dépensent beaucoup plus — ce qui suggère un déplacement vers des opérateurs périphériques particulièrement agressifs.
De plus, des enquêteurs et groupes de défense alertent sur la facilité avec laquelle des opérateurs illégaux manipulent l’opinion publique en utilisant de faux avis, des faux profils ou même en détournant des logos de banques ou d’institutions fiables pour donner une impression de légitimité.
Face à ces chiffres alarmants, VNLOK, mais aussi d’autres acteurs du secteur, appellent les géants du numérique à agir plus fermement. Les mécanismes automatisés de détection et de blocage des annonces ne suffisent manifestement pas. Les fraudeurs parviennent à échapper à la modération en enchaînant les campagnes ultrabrèves, en dissimulant l’adresse réelle des sites, ou en usurpant l’identité d’acteurs légitimes.
Mais au-delà des plateformes, c’est l’ensemble de l’écosystème qui est mis à l’épreuve. Combien de temps la législation en place pourra-t-elle contenir ce raz-de-marée publicitaire illégal ? Et surtout, comment protéger les internautes, notamment les plus fragiles : jeunes, débutants, ou en situation de vulnérabilité ?
L’étude de VNLOK révèle une réalité troublante : malgré les lois, le jeu en ligne illégal inonde encore les réseaux sociaux, et ce à grande échelle. Derrière ces statistiques, il y a des stratégies bien rodées et des millions de joueurs potentiels exposés à des risques réels. Il est plus que jamais urgent que les plateformes numériques, les régulateurs et les États prennent la mesure du phénomène.