Didier Reynders inculpé : le scandale du blanchiment via la loterie
Didier Reynders, ex-vice-Premier ministre et commissaire européen à la Justice, a été inculpé pour blanchiment d’argent le 16 octobre dernier. Au cœur du dossier, un système de blanchiment par l’achat répété de billets de loterie et de dépôts en liquide sur plusieurs années.
Un commissaire européen sous enquête judiciaire
L’annonce avait provoqué un séisme politique à Bruxelles en décembre dernier. Didier Reynders, figure majeure du Mouvement Réformateur et membre influent de la Commission européenne, était accusé de blanchiment d’argent.
Selon Le Soir, De Standaard et Follow the Money, le magistrat instructeur a formellement inculpé M. Reynders pour blanchiment d’argent et d’autres délits encore non qualifiés. Cette inculpation fait suite à une série de perquisitions et d’auditions qui remontent à la fin 2023, lorsque les premières suspicions de flux financiers suspects sont apparues.
Le stratagème : blanchir du cash via les e-tickets de loterie
Didier Reynders utilisait un mécanisme discret et efficace. Durant plus d’un an il se rendait à la station-service à quelques centaines de mètre de son domicile pour acheter des billets de loterie électroniques, appelés e-tickets. Il s’en servait comme outil de blanchiment.
Selon les enquêteurs, Didier Reynders aurait acquis pour près de 200 000 € de e-tickets en liquide sur cinq ans. Les gains auraient ensuite été reversés sur son compte joueur avant d’être transférés vers son compte bancaire personnel. C’est la Loterie nationale elle-même qui, en 2022, a signalé ces opérations à la Cellule de traitement des informations financières (CTIF).
700 000 € en liquide
L’affaire prend une tournure encore plus grave lorsque la Banque nationale ouvre une enquête parallèle visant ING Belgique, la banque personnelle de l’ancien ministre.
Entre 2008 et 2018, près de 700 000 € en espèces auraient été déposés sur son compte à vue, sans signalement immédiat. Ce n’est qu’en 2023 que la banque a finalement alerté les autorités.
Ces dépôts, combinés aux flux issus des e-tickets de loterie, ont nourri la suspicion d’un système structuré de blanchiment. Des versements fractionnés, en espèces, destinés à contourner les obligations de vigilance financière.
Le blanchiment par le jeu, une faille connue mais sous-estimée
L’affaire Reynders n’est pas la première à mettre en avant du blanchiment d’argent via les jeux de hasard. Il n’y a pas si longtemps une famille italienne avait été condamné pour blanchiment d’argent dans le célèbre Casino Café de Paris à Monaco.
Comment cela fonctionne ?
Les casinos et loteries offrent des circuits de paiement hybrides : cash, comptes joueurs, retraits en ligne, … C’est un terrain idéal pour recycler de petites sommes sur la durée.
Selon un ancien expert de la CTIF :
«Le blanchiment par les jeux est discret, répétitif et souvent invisible, car chaque opération paraît anodine. »
Cette méthode repose sur le principe du fractionnement, une stratégie qui permet de transformer de petites mises en gains “propres” avant de les déposer dans le système bancaire.
Cette technique est assez peu utilisée car le taux de retour (c’est à dire le montant gagné par rapport au montant dépensé) tourne autour des 60%.

